« Un vin produit en petite quantité sur une petite surface, de très bonne facture ». Telle est la définition d’un vin de garage. L’expression est née dans les années 90 à Saint-Emilion, pour qualifier ces petites cuvées nées dans de très grands terroirs, cultivés comme des jardins. D’après cette définition, et après avoir transféré cette idée dans la région champenoise, je peux aisément affirmer, que le Clos l’Abbé d’Hubert Soreau est un véritable Champagne de Garage, avec tout ce qu’il y a de plus noble dans cette expression.

Du Chardonnay cultivé dans trois lots distincts du Clos l’Abbé, cumulant une surface de 21 ares seulement. En partie, il s’agit vraiment d’anciens jardins, comme en témoignent les tulipes et autres narcisses qui fleurissent entre les rangs au printemps. Récoltés à pleine maturité, les raisins sont ensuite vinifiés et élevés en fûts originaires de Hautvillers, bien gardés non dans un garage, mais dans la cuverie de Nathalie, la femme d’Hubert, elle même viticultrice, produisant de véritables bijoux dans quelques parcelles choisis du Sézannais et de la Côte des Blancs sous l’étiquette des Champagne J.Vignier. Tirage des vins clairs du Clos pour la prise de mousse sous liège au printemps, puis sept à huit ans de vieillissement sur lattes pour que les quelques milles bouteilles arrivent à maturité. Du cousu main, ou plutôt de la haute couture, car même l’habillage après dégorgement se fait manuellement.

Dans le verre, derrière une pluie de fines bulles dorées, un bouquet dense et riche, que le temps révèle couche après couche. Écorce d’agrumes, fleurs séchées, du coing et des pommes mûres, des fruits secs et des arômes toastés, un soupçon de fumé… Le tout porté par une colonne vertébrale vive et minérale, avec un corps musclé et un visage d’ange. Pas seulement Champagne, mais vin avant tout, imposant et généreux, il se sert de la légèreté de son effervescence pour prendre des allures d’une danseuse étoile. Renversant !